L’effet de nouveauté

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Lorsque l’on essaie une nouvelle embouchure, les effets – lorsque celle ci est la bonne – sont immédiats, parfois même impressionnants. Puis au fil des usages, cet “effet wahou” change, évolue, s’amenuise parfois… Pourquoi ?

En bref !

L’effet de la nouveauté est un paramètre difficile à maitriser et pouvant apparaître au fil du temps. Il est très courant lorsque le changement de matériel induit un changement fort dans les réponses du cheval. Il existe cependant des astuces qui permettent de prévenir le phénomène et s’assurer que les effets constatés ne sont pas juste du fait de la nouveauté. Respecter une bonne chronologie, essayer peu de mors et définir un objectif clair en font partie. Respecter une progressivité dans le changement des paramètres et dans la technicité limite également grandement le phénomène.

Effet « kiss cool« 

« Kiss Cool, le premier effet il est cool, le deuxième effet il est pas mal non plus », dit la célèbre marque de bonbon. Et bien les effets d’une nouvelle embouchure pour votre cheval lui font le même effet. Et cet article n’est pas valable que pour le bit & bridle fitting mais aussi pour le saddle fitting et globalement, tout ce qui peut être nouveau ou induire une rupture dans les habitudes.

Votre mors ne va pas, il y a quelque chose qui cloche. Votre cheval a parfois des réactions étranges ou il ne donne pas son plein potentiel. C’est décidé, il faut essayer autre chose. Voilà donc qu’un « bit fitter » ou un conseiller en ergonomie équestre débarque dans vos écuries. Ou, en l’absence de pro, que vous débarquez près de votre cheval avec du matériel plein les poches. Durant la séance, les choses ne sont pas tout à fait comme d’habitude. Et ça, votre cheval le remarque bien.

L’effet de la nouveauté, un exemple

Il fait parfois la connaissance d’une nouvelle personne, bit fitter ou ami(e) d’écurie venu(e) prêter main forte. Il est observé pendant qu’il travaille (ce qui n’est pas forcément le cas au quotidien), a parfois un public (poke aux curieuses et curieux au bord de la carrière) et votre façon de vous comporter vis-à-vis de lui change également. Vous êtes très attentif à ses réactions, ses préférences, sa façon de se mouvoir. Vous l’êtes aussi très certainement habituellement mais durant une consultation/des essais, vous l’êtes plus encore. Bref, l’environnement est “nouveau”, dans le sens où il n’est pas habituel.

Ensuite, on lui demande un exercice complètement nouveau. Vous remarquerez certainement que votre cheval peut être assez fatigué après le passage d’un bit ou saddle fitter. Cela semble d’ailleurs curieux à certains propriétaires étant donné que les exercices effectués avec chaque mors sont très simples. Déplacement aux 3 allures, un peu de travail latéral, un peu d’incurvation…
Mais ce que vous ne voyez pas et qui demande de l’énergie à votre cheval c’est celle qu’il déploie à comprendre chaque nouvelle embouchure et à s’ajuster à son action. C’est de la fatigue intellectuelle ! Chaque nouveau mors lui demande une certaine analyse. L’encombrement change, la position change, le confort change, l’action change…Et par voie de conséquence, vos actions – qui pourtant vous semblent inchangées dans vos rênes – changent en fait également beaucoup. Et il doit réfléchir à la façon d’y répondre. Pour chaque nouvel outil.

Pfiou !

Un exercice complexe !

L’effet de la nouveauté, c’est donc tout ça à la fois. C’est même un biais cognitif, chez nous, humains. On passe aussi peut-être d’un mors vraiment très inadapté à un mors subitement adapté. Ceci peut effectivement transformer l’attitude de votre cheval en quelques foulées. Les réponses sont en général très claires.

Passé la séance, votre cheval peut tout aussi bien vous “faire une scène” lorsque vous travaillez avec son ancienne embouchure en attendant la nouvelle… Ne soyez pas fâché(e) contre lui si c’est le cas !

Le second essai

Lorsque vous recevez enfin sa nouvelle embouchure et que vous l’utilisez pour la première fois en séance, c’est comme un second essai. Sauf que dans ce second essai, il n’y a plus de “consultation”. Pas de séance bizarre ne ressemblant pas à l’habitude. Pas de public ou d’observation. Vous êtes en séance avec lui, comme toujours. Et en plus, vous savez que l’embouchure que vous venez de recevoir peut amener le cheval à être dans cette meilleure attitude ressentie lors des essais. Ceci crée une attente.

Lorsque vous commencez à travailler avec la nouvelle embouchure, il se peut que vous retrouviez “l’effet wouahou” de la première fois. Aussi fort. Ou peut-être un peu moins. Bien, mais sans plus. Ou peut-être pas du tout.

Cette embouchure, il l’a déjà eu dans la bouche, c’est moins surprenant que la première fois. Il va avoir besoin de réfléchir clairement moins longtemps pour trouver une réponse adaptée.

La progression

Passée cette première séance – parfois géniale, parfois un peu moins – on entre clairement dans ce qui est très simplement l’apprentissage. Une nouvelle embouchure et le travail que vous menez avec, c’est un apprentissage.

Et comme tout apprentissage, ça passe par plusieurs phases : progression – stagnation – progression – stagnation…

Durant les premières séances avec la nouvelle embouchure, vous allez généralement enregistrer de bon progrès. La progression dans ce cas de figure est encouragée par un cercle vertueux qui la rend souvent plus fulgurante. En effet, le cheval donne des réponses différentes, que vous encouragez, qui l’encourage à chercher des réponses encore plus adaptées (notamment pour maintenir son confort) que vous encouragez, etc…

Mais, dans l’apprentissage, il y a une autre phase derrière la progression : la stagnation.

Stagnation

Votre cheval a “terminé” de réfléchir à cette nouveauté qu’il a dans la bouche. Il sait quelles réponses apporter et il s’est mis confortable dessus. C’est une super nouvelle ! Mais seulement côté embouchures.

Cela signifie que l’embouchure est acceptée, qu’elle fait parti de ce qui est “normal” pour votre cheval. Mais ça veut aussi dire que, si en parallèle des apprentissages liés au mors, d’autres problèmes non réglés précédemment (et donc, non liés au mors) n’ont pas été “réglés”, ils vont réapparaître à cet instant précis.

Un mors, même qui va très bien, ça ne règle pas tous les problèmes. Ça n’est donc pas directement lié au mors. C’est simplement que, votre cheval est moins “obnubilé” par sa bouche et ce qu’il s’y passe. On est très clairement dans ce qui est “évolutif” au niveau de l’ergonomie. Ces singularités liées au temps d’utilisation et à ces phénomènes d’apprentissage en font partie intégrante.

Note :

Vous pouvez garder l’ancien mors si celui-ci n’est pas trop “catastrophique” durant les premiers temps, soit avoir un second mors. Cela peut être un mors envisagé dans le cadre d’une progression future par exemple. En somme, autre chose, pour pouvoir un peu “contrer” cet effet d’habituation. Travailler quelques temps avec autre chose, lorsque l’on repasse sur l’outil principal on observe généralement une nouvelle progression. C’est comme un “hooo trop bien c’est nouveau” une seconde fois. Alors que pas du tout. Mais ça ne marche pas avec tous les chevaux, certains voient vite l’entourloupe.

C’est passager

De toute façon ne désespérez pas. Ces phases, valables pour tous les apprentissages s’observent partout, tout le temps : changement de selle, de mors, de coach, de posture… Au début, si tout va bien (parce que si le matos/coach/cavalier, ça va pas, il n’y pas vraiment de phase de progression) la progression est fulgurante. La période de stagnation peut durer plus ou moins longtemps et parfois même elle est invisible. 

C’est parfois frustrant, surtout quand on est très investi pour son cheval et son équitation mais c’est une seule chose surtout : normal. Dîtes vous bien que personne, ni en équitation ni ailleurs, progresse de façon constante et continue, tous les jours, depuis plusieurs années.

Dîtes vous bien qu’après la stagnation, il y a à nouveau la progression.

L’évolution

Il y a tout de même un cas de figure où, effectivement, la progression ne peut plus se faire ou, du moins, moins bien. Il s’agit tout simplement du besoin de faire évoluer les outils dont nous disposons à cheval. En fonction de notre niveau, du niveau du cheval, son âge, des progrès techniques ou de la recherche de la performance. Votre jeune est devenu grand et sa morphologie a évoluée, votre cheval a repris confiance dans la main et vous souhaitez ajouter plus de précision… Là, en effet, si l’on reste sur une embouchure qui limite la progression, c’est dommage. Pour permettre l’évolution technique, il faut permettre l’évolution des outils